Témoignages catésiens
Journal de M. Laforest
Charles LAFOREST (1864-1932), demeurant rue Fénelon à Le Cateau, fut contremaître à l'usine Seydoux.
Marié à Blanche MAILLARD (1863-1921), il eut une fille : Germaine, qui épousa René LEMAIRE. (domiciliés au Cateau, rue Fénelon). Une petite fille : Éliane LEMAIRE (1924-1948) qui épousa Lucien CARPENTIER (Bazuel) et décéda prématurément sans descendance.
René LEMAIRE, après le décès de sa femme, finit ses jours à Montigny-le-Bretonneux. C'est ainsi que le manuscrit (2 cahiers reliés) parvient à M. Albert TAISNE, agriculteur à Montigny, qui le communique à la Bibliothèque du Cateau lors de 1'expositi0n : Le Cateau-Cambrésis 1914-1918 (novembre 1994).
Charles LAFOREST est enterré avec son épouse et sa petite fille au cimetière du Cateau.
Notes du Docteur Tison
Extraits des notes du Dr Pierre Tison sur la Bataille du Cateau (18 octobre 1918)
Le Docteur Pierre TISON a commencé sa carrière médicale au Cateau pendant la Grande Guerre et a été un témoin de l’occupation allemande entre 1914 et 1918.
Historien, il est l’auteur d’une importante histoire du Cateau, non achevée et non publiée, restée inédite.
1er janvier 1916 :
Les prisonniers travailleurs civils font de la flamiche avec de la farine provenant de la gare, et des biftecks aux frites, en les cuisant à la graisse enlevée à l'abattoir où ils travaillent... ce sont leur étrennes !
9 janvier 1916 :
Le pain de plus en plus mauvais, souvent sans levure... mou, gluant, indigeste – on notait au Cateau, en mars, les conséquences néfastes sur la santé, (les grains avariés, moisis) ulcères de l'estomac, entérites, infections cutanées.
4 juillet 1916 :
Le 4 juillet, la gare du Cateau est bombardée par avion, trois prisonniers civils de 17 et 18 ans sont tués. Hélas ! D'autres jeunes gens vont tomber, victimes d'inanition, « faiblesse générale », porteront les bulletins de décès délivrés par les médecins allemands. Ils moururent d'épuisement, de manque de nourriture, de froid et de faim... et combien, rentrés au foyer, s'éteindront, lentement, minés par la tuberculose.
9 juillet 1916 :
Le couvent des Clarisses de Péronne est reçu à Montay, dans la ferme de la Feuillée ; cet asile est provisoire car cette ferme est reprise pour les travailleurs civils. Les 25 Clarisses recevront l'hospitalité de M. et Mme Paul Deligny, à la sucrerie de Montay. Parmi ces pauvres religieuses, les plus âgées n'avaient pas quitté le cloître depuis 60 ans... certaines n'avaient jamais vu de locomotives... et montèrent pour la première fois, non sans frayeur, dans le train d'évacuation. Un chariot les conduisit de la gare du Cateau au village de Montay.
25 juillet 1916 :
De nouveaux impôts sont exigés par le général von Bülow, commandant la 2e armée... le lieutenant général inspecteur d'étapes, von Nieber, répartit les charges qui, pour la Kommandantur du Cateau s'élèvent à près de deux millions de francs. Le Cateau est imposé pour 664,000 francs et Neuvilly pour 159,000.
5 août 1916 :
Les exigences allemandes sont de plus en plus fortes et vexatoires : les objets d'art sont réquisitionnés (bronze, cuivre, laiton).
17 août 196 :
Les portes des maisons doivent rester ouvertes la nuit... avec fiches au dehors avec le nom, l'âge de tous les habitants, ceci pour faciliter les perquisitions nocturnes.
26 août 1916 :
Le 26 août, pluie et orages... les cloches du Cateau sonnent, par ordre, à toute volée... pour l'inauguration du cimetière d'honneur sur la chaussée Brunehaut (Roemen Strasse... chaussée romaine !) sur une pièce de terre des Pauvres du Cateau...
29 août 1916 :
Trois jours après cette émouvante cérémonie du souvenir, on apprenait la déclaration de guerre de la Roumanie à l'Autriche.
Novembre 1916 :
L'éclairage électrique fut longtemps défaillant. On s'éclairait avec des veilleuses, consommant peu de saindoux, denrée rarissime. Des privilégiés avaient du carbure pour l'acétylène.
Décembre 1916 : disette>
Les Allemands prenaient tout le lait disponible et infligeaient une amende de 1 mark par litre de lait manquant (7 litres par vache). Le ravitaillement américain dut assurer deux boîtes de lait condensé par mois aux populations et une boîte supplémentaire par semaine aux grands malades.
Rapports de délibérations des conseils municipaux
Le maire du Cateau, M. Albert BOULOGNE, qui a été mobilisé au début de la guerre, se trouve prisonnier de guerre en Allemagne. En son absence, c'est M. Émile PICARD, Premier adjoint qui prend la tête du conseil municipal.
Pendant tout le conflit, le rôle et la responsabilité des élus sont très importants : ils doivent faire face aux exigences de l'autorité allemande pour éviter des représailles sur la population, sans tomber dans la collaboration avec l'ennemi, dont ils savent qu'ils devront répondre après le conflit. La rédaction des comptes-rendu des séances tient compte de ces exigences : minutieuse impersonnelle et prudente, elle rend peu compte de débats éventuels et montre un conseil uni dans toutes les décisions prises. Isolés dans leur ville et sans aide de l'état et de l'administration, les élus doivent aussi s'occuper de tous les aspects de la vie des Catésiens.
Pendant l'année 1916, le conseil se réunit 14 fois, et consacre l'essentiel de ses travaux aux problèmes du ravitaillement et aux questions financières.